N° 62. La Fraternité confrontée à la violence – Un appel à l'intériorité et à la spiritualité
JEAN-BAPTISTE DE FOUCAULD, JEAN-MARIE GOURVIL ET ELIZABETH LEBLANC
CD disponible sur demande
Présentation
Dans nos vies personnelles et collectives, nous sommes amenés à faire face à la violence, violences personnelles ou violences sociales, mais aussi souvent violences des religions. Quelle que soit notre situation, nous sommes appelés à faire face, c'est-à-dire trouver en nous et avec les autres, ensemble, les moyens de résister pour transfomer ces violences en énergie et force de Vie. Pour en débattre nous faisons appel à :
- Jean-Baptiste de Foucauld, coordinateur du Pacte Civique et Président de Démocratie & Spiritualité;
- Jean-Marie Gourvil, sociologue de l'action sociale et de la tradition ascétique et mystique de l'Orient chrétien;
- Élizabeth Leblanc, psychanalyste jungienne, fondatrice de l'école Savoir Psy. Nous explorerons avec eux comment vivre dans la violence (question particulièrement actuelle) et l'abandonner, c'est-à-dire revenir aux sources de la sagesse et redécouvir le combat de l'homme intérieur !
de Foucauld
Je vais essayer d’aborder la question de la violence sous l’angle politique collectif et social. La question est de savoir s’il faut répondre à la violence par une autre violence, par la contrainte.
Je partirai de la notion de la violence. Qu’est-ce que la violence ?
La violence est un fait social total. C’est ce que dit Marcel Mauss, c’est un fait qui touche la société dans son ensemble. La vie elle-même est « violence » : c’est une bataille permanente, il faut survivre, mais cependant, la vie n’est pas que cela car il n’y a pas de vie sans coopération, sans lien, sans agrégation, sans réciprocité. Darwin montre qu’il y a sélection naturelle. Je me suis souvent fait cette remarque qu’il ne peut y avoir de sélection s’il n’y a pas d’abord organisation. Il y a un principe organisateur avec de la sélection mais il y a aussi de la création et de la compétition. Il y a une part importante d’énergie, de discorde, de conflit et une part de coopération, d’activité. C’est ce qui fait notre société, car il nous faut trouver un équilibre entre les deux. La responsabilité de l’homme est d’arriver à discipliner la violence et à trouver un équilibre viable.
Il faut donc partir de l’idée que l’être humain a des besoins, qui peut le mettre éventuellement en compétition avec autrui, des désirs qui ne sont pas nécessairement concordants. Ce qui caractérise l’être humain est qu’il dispose de plus d’énergie que ce dont il a besoin pour simplement survivre, ce surplus le pousse à la créativité et ce surplus rentre aussi en compétition avec autrui.
Comment les sociétés se sont elles organisées pour faire face à cette contradiction ? Les différentes sociétés sont échafaudées de manière diverse. Si on regarde par exemple les sociétés traditionnelles, les sociétés primitives, on s’aperçoit que cette question d’harmonie sociale est structurée par des rites, des coutumes très structurés, mais qui sont assez contraignants. Elles sont ingénieuses et la régulation elle-même comporte une certaine violence. Ensuite, les sociétés qui bannissent la violence où la religion est devenue importante se sont régulées différemment : la religion permet de faire valoir des normes qui viennent d’en haut et qui du coup sont acceptées, ce qui permet une certaine régulation. Puis la troisième forme, c’est la mise en œuvre de l’Etat dans les sociétés, qui n’existe évidemment pas dans les sociétés primitives, c’est-à-dire un corps de fonctionnaires, d’agents, de représentants politiques censés organiser la vie sociale, par la démocratie. Il y a un saut qui est franchi. On peut désormais vivre à l’état naturel avec moins de contraintes. On peut laisser les individus plus libres, les individus sont déclarés égaux et en débattant on arrive à réguler la violence. Enfin, il y a le développement économique des sociétés qui va jouer un rôle. En investissant, en créant des entreprises, on arrive à mobiliser l’énergie humaine, ce qui est créateur d’une moindre servitude. Avec le développement économique, on concentre l’énergie humaine vers des activités productives qui obligent les individus à faire des efforts, ce qui est créateur d’une moindre servitude, et qui permet aussi plus de donner plus de liberté aux individus.
Il y a 2 écoles face à la violence :
- une vision pessimiste : selon le philosophe Hobbes, la société est très dangereuse, l’homme est un loup pour l’homme, donc il faut organiser des contraintes très fortes pour réguler la violence inhérente aux sociétés.
- la vision optimisme : selon Mauss, dans l’homme, il y a une capacité à donner, à recevoir. Le fait d’accepter de donner, de partager, permet à l’autre de donner à son tour. Quand on reçoit, il y a comme une dette culturelle qui fonde le lien. Il y a une sorte de contrat implicite. C’est une école plus optimiste. Le don anthropologique est à la fois intéressé et désintéressé. Si on donne à quelqu’un qui ne rend jamais, il y a déséquilibre, le circuit va s’arrêter. Alors on va inventer une manière de mettre en place la réciprocité et imaginer comment donner et rendre ce qu’on a reçu.
La vision que l’on a de la réalité est très importante pour mettre en place une forme de régulation : si l’on pense que la société est violente, si l’on est pessimiste, alors, il faut des contraintes fortes, si l’on considère au contraire que la société est capable de coopération, que la bonté est inhérente à l’homme, alors on agit sur ce plan. Je pense qu’il faut une vigilance bienveillante pour réguler la violence au sein de la société. Si l’on pense que la société est emprunte de bonté, il faut se donner les moyens de faire émerger cette bonté.
Je crois qu’il faut fonctionner sur la base d’une confiance vigilante. Dans la relation humaine, on ne peut être exclusivement confiant. D’une manière plus générale, il faut regarder la vie avec deux yeux ; la vie est complexe, pleine de contradictions. Tout arrive par discorde. Le grand sujet de nos sociétés c’est d’arriver à un mécanisme démocratique et spirituel de la violence. C’est un sujet que chaque époque doit traiter. Le problème de réguler la violence, est un sujet que chaque époque doit résoudre : chaque époque doit fait face à des défis différents, à des violences particulières. Nous avons échappé à des périodes de guerre, mais actuellement, nous voyons bien que cela ne va pas très bien, qu’il y a de la violence dans la société. Il faut travailler sur notre propre violence. La vie est complexe, faite de contradictions qu’il faut essayer de gérer au mieux.
Il y a 3 formes de violence :
- la violence de l’exclusion dont s’occupe La Traversée : violence muette de l’exclusion liée au fait que le lien social s’est totalement délié, délité. Une des violences liée au chômage est qu’elle rend muet. Les liens étaient peut être trop contraints dans les sociétés traditionnelles, mais aujourd’hui, ils sont maintenant trop défaits. Il ya le problème du sens à retrouver.
- il y a la violence des formes actuelles de la mondialisation économique, écologique, financière, commerciale, très brutale. Cela n’a pas été préparé sur le plan culturel. Il y a des niveaux de développement très différents entre les pays et à l’intérieur des pays. Nous avons des victimes de la mondialisation, aussi bien dans les pays riches que dans les pays en développement. Les classes moyennes émergentes dans certaines sociétés sont fragilisées et les classes moyennes dans un pays comme le nôtre craignent le déclassement. Pour le moment, on n’a pas trouvé de solutions régulatrices à ce problème de la violence économique qui mine nos sociétés. Il n’y a plus les formes de sécurité des sociétés traditionnelles qui apportait une certaine régulation. Il faut inventer d’autres formes de sécurité.
- il ya une troisième forme de violence. C’est que, dans ce sentiment d’exclusion, il y a risque de se tourner vers des formes de ripostes violentes et radicales. On retrouve alors une violence qui permet à certains de trouver un sens à leur vie mais de manière archaïque et dangereuse. Face à la situation, il y a des formes de violences anomiques.
Face à cette situation, comment pouvons-nous faire face ?
Il faut résister à la violence, à la tentation de tomber dans la violence nous-mêmes, trouver autre chose. Il faut avoir de l’utopie transformatrice. La culture de la résistance est importante pour résister à la violence. La non violence n’est pas le silence. Le capitalisme très dur, trop dur, économique et financier n’est pas supportable. La fraternité, comme disait Régis Debray, c’est la vieille cousine qu’on invite plus à danser ; on peut considérer que la fraternité c’est une manière de résister, c’est une utopie qui n’est jamais totalement organisée. Nous devons l’explorer et trouver autre chose comme réponse à la violence que la violence elle -même ! La fraternité est un sujet très vaste, on n’a pas encore exploré tous les éléments qui la composent.
Il faut transformer la violence en conflits positifs. Là où il y a de la violence, il faut organiser du conflit positif, plutôt qu’user de là violence. C’est tout le débat social. Cela passe par l’éthique de là discussion. Là où il y a du conflit, il faut qu’il y ait partage, discussion. Il faut travailler ensemble, se parler réellement. Souvent dans le débat politique, on voit à quel point on ne se parle pas. Les conflits ne sont pas des conflits d’idées, mais deviennent des conflits de personnes. On accuse les personnes en tant que telles. Ce n’est pas cela l’éthique de la discussion. Il faut faire remonter le vécu des personnes, il faut se mettre autour d’une table ensemble et discuter. Par rapport à l’immigration par exemple, il faut aussi voir la France qui souffre, la France des quartiers moins sensibles qui ne souffrent pas de l’immigration, la France des immigrés qui souffrent de la France. La discussion permet de partager l’information, de faire remonter les ressentis des personnes en difficulté et d’avancer.
Dans les villes et banlieues en difficulté, quelqu’un qui s’appelle Charles Rojzman, qui a inventé la thérapie sociale, est allé dans les quartiers faire parler avec les jeunes les élus municipaux. Ils se mettent en réunion et commencent à se parler chacun son tour.
Il y a une école française de la non-violence qui n’est pas utopiste. C’est une théorie politique de la non-violence. C’est une méthode plus lente mais plus efficace pour résoudre les problèmes. Si l’Algérie avait agi avec un peu moins de violence pour son indépendance, on n’en serait pas là aujourd’hui. Les dictatures d’Amérique latine ont réussi à se débarrasser de leurs dictateurs. Le communisme s’est effondré sans un seul mort. Dans les pays où il y a eu des résistances au niveau de la société civile, il a pu y avoir évolution. Jean-Marie Muller n’est pas un utopiste, il a écrit « La violence est parfois inévitable, mais jamais légitime ».
D’autre part, il y a un sujet qui est très peu abordé, sur lequel on a peu réfléchi, c’est le désir de pouvoir. Il y a bien là un excès, narcissisme, une volonté de dominer qui crée problème. Les grandes manifestations de janvier 2015 ont montré qu’il y avait de la fraternité et il y a eu une demande de fraternité très forte sur le terrain. Mais cette fraternité doit être construite, elle n’émergera pas toute seule.
Construire une certaine politique de la fraternité, c’est à la fois un droit et un devoir. Il faut en faire un devoir et ne pas rechigner sur cela, ne pas se dire que l’on ne peut pas, que c’est perdu d’avance. C’est un principe régulateur. La liberté fraternelle, confraternelle, est nécessaire. Il faut en définir les frontières. On a un devoir de respecter les accords qu’on a signés concernant les réfugiés. Le Pacte Civique a été pensé pour développer cela. Mais pour que cela existe, il faut développer quatre valeurs : Créativité, Sobriété, Fraternité, et Justice, quatre valeurs qui fonctionnement simultanément.
Voilà comment sur le plan politique, on pourrait développer une fraternité pour faire face à la violence de nos sociétés.
J.-B. de Foucauld
Leblanc
Si aujourd’hui, la violence nous apparait comme un problème de société, c’est aussi un problème individuel. Ce qui se passe dans le monde extérieur est miroir de notre monde intérieur. Chacun est porteur, d’une certaine manière, d’une coresponsabilité dans cette violence extrême que nous vivons aujourd’hui et qui nous renvoie à notre propre violence, quand celle-ci n’est pas conscientisée.
Pour comprendre ce rapport extérieur-intérieur, donner sens à l’émergence de cette violence et pour pouvoir la combattre, nous devons revenir à la nature de l’homme.
L’homme est bon et mauvais…
Depuis l’Antiquité la question du bien et du mal a occupé philosophes et théologiens. En particulier, le sujet « l’homme est-il bon ou mauvais par nature » a fait l’objet de débats houleux. La réponse à cette question, « l’homme est bon par nature » ou « l’homme est mauvais par nature » entraine nécessairement attitudes et prises de positions diamétralement opposées.
Aujourd’hui, d’un point de vue psychologique, comment pouvons-nous aborder cette question :
- Initialement, notre nature animale nous pousse à nous méfier de tout ce qui peut constituer un danger, peur de l’inconnu, peur de l’étranger, nécessité de se battre pour défendre sa vie, ses biens ou son territoire… C’est ce qui a permis, à l’aube de l’humanité, de survivre et de se développer. Même si nous ne sommes plus dans les mêmes situations, nous en portons toujours les traces ontologiques qui ne demandent qu’à s’exprimer dès qu’on se sent en danger, qu’’il s’agisse d’un danger matériel ou psychologique. L’agressivité qu’entrainent la peur, l’angoisse de l’inconnu, la frustration, le besoin de se défendre… est la même et peut se manifester avec la même violence.
- Initialement – en même temps – notre nature humaine nous donne une sensibilité toute particulière pour nos congénères, nous fait agir avec une sympathie innée, de la compassion, de l’attention… Cela nous vient des soins, de la tendresse, de l’amour diffusés par la fonction maternelle à l’aube de notre existence. Nous ne sommes plus dans la nature animale et les sentiments d’appartenance et de reconnaissance, la conscience de l’autre, l’empathie, le désir d’échanger, de participer, de se sentir exister dans la relation à l’autre nous rendent capable de transcender les aspects les plus féroces de notre nature.
En nous, ces deux tendances coexistent. Ainsi, nous sommes tiraillés entre une violence défensive et une bienveillance inconditionnelle, ce qui nous renvoie à la question de départ : l’homme est-il bon ou mauvais par nature ?
Eh bien, par nature… l’homme est à la fois bon et mauvais, capable potentiellement d’être bienfaiteur ou destructeur ! Et dans un moment donné, qu’il soit l’un ou l’autre, qu’il exprime la violence ou l’amour renvoie à sa capacité de maitriser ses pulsions et de les transformer.
Les dangers de l’unilatéralité
Le bien et le mal, le bon et le mauvais sont les deux pôles d’un même archétype.
Bien sûr, tentation est grande de vouloir éliminer purement et simplement le pôle négatif. C’est l’unilatéralité. On peut décider de renoncer à la violence… mais il n’est pas sûr que celle-ci accepte de renoncer à nous : tôt ou tard, elle se manifestera d’une manière d’autant plus déchainée qu’elle aura été niée. Et elle peut prendre toutes sortes d’aspects, explosive ou glaciale, physique ou psychologique…
Car la répression d’une polarité archétypique entraine toujours un déséquilibre pathologique, un violent retour du refoulé tant sur le plan individuel que collectif. Alors, le « mal » est passé à l’acte. Il nous faut donc avoir le courage d’accepter de reconnaitre et de nous réapproprier cette part d’ombre. Ou pas ! Nous trouvons alors toutes sortes de prétextes pour justifier la bienséance de nos actes ou de nos paroles, dans un déni qui, de fait, rend l’autre coupable à notre place.
Et c’est bien ce qui se passe – toujours - quand la part de refoulé se projette sur cet autre qui va servir de bouc émissaire, porteur de la violence qu’on a refusé de reconnaitre en soi. Coupable a priori, il va faire l’objet d’une brutalité inouïe à laquelle il va répondre par la même brutalité. Lorsque le mal fait irruption à un moment donné dans l’ordre des choses, la réponse ne se fait pas attendre : l’action appelle inévitablement la réaction dans une surenchère de destruction. Le cycle de la violence devient tragiquement inéluctable.
Chacun, restant dans ses positions, considère l’autre comme étant la personnification du mal, ce qui justifie la violence en retour. Ainsi nous devenons tour à tour victimes et tortionnaires dans un mouvement incohérent dans lesquelles nous croyons être légitimes dans ce que nous croyons être une réponse à une agression, alors que nous sommes en réalité entraînés dans un tourbillon où bien et mal ne se distinguent plus.
Alors comment sortir de là ? Tel qu’il se présente, le problème est insoluble puisque le bien et le mal sont inéluctablement associés et que la violence appelle la violence.
Nous sommes dans le système binaire de la violence ordinaire, où chacun pense avoir raison – identifié au bien – alors que l’autre, forcément, est dans son tort - identifié au mal (lui, de son côté, est exactement dans les mêmes dispositions, en miroir. Chaque protagoniste d’un conflit est le « Satan » de l’autre). Tant que chacun reste sur ses positions, rien n’est possible, car accepter « de se rendre à la table des négociations » demande de reconnaitre avant tout que l’autre n’a pas tous les torts, et donc que, nous-mêmes, nous n’avons pas complètement raison.
Le nécessaire retournement
C’est sans doute là que peut intervenir la notion de renoncement, non au sens fataliste du terme, mais au sens spirituel. Mais cela demande d’accepter de se retourner vers soi-même, vers ces zones de nous-mêmes, inconnues, sombres, effrayantes parfois, qu’il nous arrive d’entrapercevoir à l’occasion d’une réaction, geste ou parole qui nous surprend nous-mêmes, tant il se montre éloigné de notre comportement habituel, poli et civilisé.
Parce que finalement, ce refus que nous avons de l’autre sous certains de ses aspects, ce sont les mêmes aspects en nous que nous refusons. Cette violence que nous avons à son égard, n’est-ce pas cette même violence que nous avons pour nous-mêmes quand nous nous apercevons que ce qui nous insupporte chez l’autre existe bel et bien dans notre monde intérieur ?
La réaction première, bien compréhensible, est de nier, rejeter, taire ces aspects de nous-mêmes qui nous font si honte. A cet endroit-là, la culpabilité que nous éprouvons de ne pas être absolument parfait doit être surmontée. Cela n’est possible que si on accepte, avec humilité, notre réalité d’humain perfectible.
Alors on pourra les regarder ces tendances, les intégrer peu à peu, en maitriser les mauvais côtés et en déployer les richesses. Ainsi diminuera la violence à notre propre égard, et à l’égard de l’autre.
Le modèle anthropologique de Jung nous montre que les deux extrêmes peuvent se poser en complémentaires et, par leur conjonction, donner naissance à une troisième forme, fruit de la transcendance, source de toute créativité et… de paix.
Seul un changement dans la mentalité de l’individu peut apporter un réel changement dans la collectivité. Il s’agit en premier lieu de briser ce désir de toute-puissance, cette illusion d’incarner le beau, le bon et le juste. Certes c’est vers cette perfection que nous tendons, mais ce but ne sera (peut-être) atteint qu’après ces efforts de retournement – encore et encore – vers nos zones d’ombre, vers ces parts de nous-mêmes dont nous avons honte, là où résident toutes nos violences non intégrées.
La transcendance
Nous sortons alors peu à peu du système binaire des catégories du bien et du mal, du bourreau et de la victime, du parfait et de l’imparfait, du pur et du corrompu…
Et au-delà de l’inévitable perturbation qui va s’ensuivre, un nouvel espace va pouvoir s’ouvrir, un renouveau de vie. La question de la violence ne se pose plus : en réponse à la violence, c’est une énergie de vie qui se présente, mettant en avant l’une des caractéristiques de l’être humain : sa faculté de communication, son désir de rencontre, qui, sans tout permettre, place au premier plan l’amour de l’autre, la vraie fraternité.
Même si on ne s’y confronte pas directement, la violence collective est le problème de chacun.
E. Leblanc